Les maisons de naissance : un cocon sécuritaire et intime

Par Armelle Fruchard | Mise à jour le 9 juillet 2024

Les accouchements en maison de naissance offrent une alternative à l’accouchement hospitalier, privilégiant l’intimité et la physiologie naturelle. Les sages-femmes assurent un suivi complet depuis la grossesse jusqu’aux visites postnatales. Quelles sont les spécificités des maisons de naissance ? Comment se passe un accouchement en maison de naissance ? Réponses

Qu’appelle-t-on maison de naissance ?

En France, les maisons de naissance sont une option relativement récente (2016). Bien qu’encore peu répandues, ces établissements offrent une approche unique : un accouchement non médicalisé, comme à la maison, mais avec la sécurité de disposer d’une maternité accolée. 

La définition donnée par le décret de 2021 est « structures permettant la réalisation par des sages-femmes des accouchements à bas risque des femmes dont elles ont suivi la grossesse dans le cadre d’un conventionnement avec une maternité contiguë » . 

Ainsi, les maisons de naissance se distinguent par plusieurs spécificités :

  • Une équipe de sage-femmes unique assure l’intégralité du suivi des familles, de la grossesse aux visites post-natales, favorisant ainsi une continuité de soins.
  • L’accouchement y est non-médicalisé, ce qui signifie qu’aucun médicament analgésique, comme la péridurale, n’est administré, et aucune intervention médicale n’est prévue (pas de monitoring continu, pas de perfusion ni d’injection d’hormones).
  • Les équipes en maison de naissance n’incluent pas de gynécologue obstétricien, d’anesthésiste ni de pédiatre.
  • Après l’accouchement, le retour à la maison se fait dans les heures qui suivent. Les maisons de naissance ne sont pas faites pour séjourner. 

Chaque maison de naissance fonctionne en partenariat avec une maternité voisine (c’est d’ailleurs une condition sine qua non à leur ouverture) afin de garantir une sécurité médicale en cas de besoin. C’est une relation de partenariat et non d’opposition. La maison de naissance est une alternative permettant d’élargir l’éventail de possibilités de lieux de naissance aux futurs parents.

“La possibilité d’accoucher uniquement avec des sages-femmes, dans un environnement moins médicalisé. Ils connaissent également notre projet de naissance, ce qui est très important pour moi. Pouvoir accoucher dans un environnement familier était vraiment notre choix. “

Où se situent les maisons de naissance en France ? 

La France dispose aujourd’hui de 8 maisons de naissance. À l’origine, il y en avait 9 mais le projet de Vitry sur Seine a été abandonné. 

Voici les 9 maisons de naissance en France et DOM-TOM et leur localisation :

  • CALM – Maison de naissance à Paris (75012),
  • La Casa de Naissance à Aubagne (13400),
  • Maison de naissance DOUMAIA à Castres (81100),
  • La Maison à Grenoble (38000),
  • Le Temps de Naitre à Baie-Mahault (97122 Guadeloupe),
  • Joie de naître à Saint Paul (97460 La Réunion),
  • Premières heures au monde à Bourgoin-Jallieu (38300),
  • MANALA, Maison de naissance Alsace à Sélestat (67600),
  • Un nid pour Naître à Nancy (54000).

Les places étant (très) limitées, il convient de faire les démarches rapidement si vous souhaitez accoucher en maison de naissance. 

Renseignez-vous en premier lieu sur leur emplacement géographique par rapport à votre domicile. La proximité est essentielle pour ce suivi, car toute la grossesse s’y déroule. Si vous n’obtenez pas de place en maison de naissance, pourquoi ne pas vous tourner vers l’accouchement en plateau technique ou en salle nature ? Ces lieux sont plus nombreux et sont de bonnes alternatives pour les souhaits d’accouchements physiologiques. 

Quelles sont les conditions nécessaires pour accoucher en maison de naissance ? 

Pour accoucher en maison de naissance, des critères d’éligibilité sont requis pour assurer la sécurité de la mère et de son bébé : 

  • Grossesse simple : vous devez attendre un seul bébé.
  • Grossesse à bas risques : votre grossesse se déroule normalement, sans antécédents particuliers (pas d’utérus cicatriciel, pas d’hémorragie post-partum lors d’un précédent accouchement).
  • Volonté d’un accouchement physiologique sans péridurale.
  • Accouchement à terme : la naissance doit arriver naturellement entre 37 et 41 SA.
  •  Présentation du bébé : il doit être en position tête en bas.
  • Absence de pathologies : Vous ne devez pas présenter de diabète gestationnel, des signes de pré-éclampsie, ou une infection.
  • Proximité géographique : Vous devez vivre à une distance maximale de 40 minutes de la maison de naissance.

Il est important de noter que la dimension « à bas risque » de la grossesse est réévaluée tout au long de la grossesse avec votre sage-femme. En cas de pathologie détectée pendant la grossesse, l’accouchement en maison de naissance ne sera pas possible. C’est pourquoi, une inscription préalable à la maternité et une rencontre avec l’anesthésiste sont requises quelques semaines avant la date prévue de l’accouchement, comme pour tout autre accouchement.

En quoi les maisons de naissance favorisent-elles les accouchements physiologiques ? 

Les maisons de naissance sont particulièrement adaptées aux futures mamans en quête d’un accouchement physiologique. 

En effet, ce type de structure privilégie l’intimité tout en étant étroitement lié aux services hospitaliers afin de garantir la sécurité en cas de besoin. 

Le suivi global est assuré par une seule sage-femme (ou deux) ce qui permet de créer une sécurité affective qu’on sait essentielle pour un accouchement physiologique réussi. Durant les rencontres prénatales, l’accent est mis sur la physiologie pour être en confiance le jour J et avoir des outils pour gérer et apprivoiser les contractions (chant prénatal, hypnose, relaxation. Les analyses et les échographies sont faites à l’extérieur, comme lors d’un suivi classique. Physiologie ne veut pas dire absence de suivi médical. 

Le jour de l’accouchement, la future maman est entourée de sage-femmes qui la connaissent et avec qui elle a eu le temps de créer un lien de confiance, ce qui est très précieux par rapport à l’hôpital. 

Les maisons de naissance sont spécialement conçues pour créer un environnement intime et favorable à un accouchement naturel. Les salles de naissance sont aménagées de manière à encourager la mobilité pendant le travail et offrir divers outils de gestion de la douleur : baignoire, lianes de suspension, bouillottes, balles de pilates, etc… Tout est soigneusement pensé pour créer une atmosphère intime et permettre de s’immerger dans une bulle d’intimité et de bien-être. De même, le bruit et la lumière sont limités afin de ne pas risquer de perturber le processus naturel de l’accouchement. 

« Pour moi, c’était le lieu le plus sûr et le plus naturel que je pouvais choisir pour mettre au monde mon enfant. C’est comme un petit cocon« .

Enfin, en évitant tout geste médical potentiellement iatrogène (c’est-à-dire pouvant entraîner des complications), les accouchements en maison de naissance permettent d’être plus sécuritaires pour la mère et l’enfant. 

Quel est le prix d’un accouchement en maison de naissance ? 

Actuellement en France, accoucher en maison de naissance représente un coût et leur accès est donc conditionné par des critères de ressources. Les subventions gouvernementales sont insuffisantes, ce qui se traduit par des dépassements d’honoraires importants. Pourtant, ces structures démédicalisées, ne dispensant pas de frais de séjour et nécessitant peu de personnel contribuent significativement à réduire les coûts de ce type d’établissements par rapport aux maternités classiques.

En moyenne, on estime que le prix total d’un accouchement en maison de naissance tourne autour de 1000/1500 € (après déduction de la prise en charge de la Sécurité Sociale).  Pour vous donner une idée, voici les tarifs pratiqués par la maison de naissance CALM à Paris en 2023 : 

Prix (€)Remboursement Sécurité sociale (€)
1ère consultation + entretien prénatal précoce9067
7 consultations + séances de préparation9058,60
Travail et accouchement au CALM1250376,20
Travail au CALM avec transfert aux Bluets1000112
1ère visite à domicile10075
2e visite à domicile8050,20
Autres visites à domicile8059
2 consultations postnatales (3-4 semaines et 6-8 semaines)6042,50 (chacune)
Total pour un suivi globalentre 2100 € et 2350 €entre 858,60 € et 1122,80 €
Reste à votre chargeentre 1227,20 € et 1241,40 €

Certaines mutuelles peuvent couvrir une partie de ce reste à charge. Dans certaines maisons de naissance, un Fonds de Solidarité a été mis en place afin d’apporter une assistance financière à certaines familles dans le besoin. 

Les maisons de naissance sont-elles des lieux sûrs ? 

Absolument, les maisons de naissance sont des environnements sécurisés pour l’accouchement grâce à leurs protocoles stricts qui visent à prévenir certains risques afin d’assurer la sécurité de la mère et de l’enfant, , conformément aux directives établies par la Haute Autorité de Santé (HAS) en 2014.

Il est important de rappeler que les maisons de naissance sont prévues pour accueillir des grossesses à bas risque. Si, au cours de la grossesse, un facteur de risque surgit, la mère sera orientée vers une maternité partenaire afin d’assurer la continuité des soins.

Une étude réalisée par le National Perinatal Epidemiology Unit (NPEU) de l’Université d’Oxford en 2011 sur plus de 64 000 femmes a confirmé que les maisons de naissance présentait un haut niveau de sécurité, similaire aux services obstétricaux traditionnels. Ce taux de performance est possible grâce à la sélection des grossesses à bas risque, la proximité avec une structure hospitalière et la présence de deux sage-femmes minimum tout au long de l’accouchement. Dans ces conditions, il a été prouvé que les naissances se déroulent plus naturellement et nécessitent moins d’instrumentalisation  (épisiotomie, forceps, hormones de synthèse, etc). 

Quels sont les soins donnés au bébé dans une maison de naissance ? 

Donner naissance dans une maison de naissance n’exclut pas les premiers soins au bébé. L’évaluation du score Apgar est effectuée, et votre nouveau-né est rapidement placé en peau à peau avec vous. Si tout se passe bien, le clampage tardif du cordon ombilical est pratiqué, et généralement, il n’y a pas de procédure d’aspiration des sécrétions. En ce qui concerne le bain, la décision vous appartient mais c’est souvent déconseillé pour éviter trop de variations thermiques pour votre nouveau né. 

Le retour à domicile a lieu rapidement, dans les 4 à 6 heures qui suivent la naissance. Pour autant, des visites post-natales sont prévues à votre domicile par votre sage-femme. Durant ces premiers jours, elle vérifiera votre état de santé, celui de votre bébé mais pourra également vous soutenir dans la mise en place de l’allaitement et répondre à toutes vos questions. 

Quelle est la situation actuelle des maisons de naissance ? 

En 2023, la France ne dispose que de huit maisons de naissance et leur répartition sur le territoire est inégale. Elles réalisent environ 800 accouchements chaque année. Cette faible disponibilité entraîne des taux élevés de refus d’admission, atteignant jusqu’à 75% à Paris et environ 40% dans les autres régions (source : Collectif des Maisons de Naissance françaises, 2023)

En 2016, lors de l’établissement des premières maisons de naissance en France, une période d’expérimentation de cinq ans avait été prévue. En 2021, à la fin de cette phase d’essai, les résultats se sont révélés extrêmement positifs. Pourtant, alors que le gouvernement s’était engagé à ouvrir 12 nouvelles maisons de naissance d’ici la fin de 2022, aucune n’a vu le jour. En pleine crise du système de santé, le gouvernement se désengage. Pourtant, les maisons de naissance offrent une alternative sécurisée et à moindre frais à de nombreuses patientes à bas risque.

En France, plus de trente projets de maisons de naissance sont en cours de développement, mais ils font face à de nombreux obstacles, notamment en ce qui concerne les conditions de recrutement des sages-femmes et le financement de ces établissements. La spécificité française exige que la maison de naissance soit adossée à la maternité partenaire. Cela signifie qu’une simple séparation physique, même d’un trottoir, devient un obstacle majeur pour la réalisation de la plupart de ces projets. 

Or, plus de 140 000 femmes se voient refuser chaque année l’accouchement en maison de naissance, alors même qu’elles le souhaiteraient  (sondage Ipsos novembre 2019). En fin de compte, la question demeure : quelle sera la trajectoire des maisons de naissance en France et dans le monde, alors que de plus en plus de femmes recherchent des options d’accouchement plus personnalisées et moins médicalisées ?

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