Accoucher sans pousser : c’est possible ?

Par Armelle Fruchard | Mise à jour le 1 mars 2024

Pour certaines, elle est source de soulagement, pour d’autres, c’est le moment tant redouté de l’accouchement. La poussée représente le dernier élan avant cette rencontre tant espérée avec votre nouveau-né. Mais est-ce vraiment le moment de précipiter les choses ? Faut-il réellement pousser pour faire naître son bébé ? On vous explique !

Qu’est-ce que la poussée réflexe ? 

La poussée réflexe est un phénomène naturel et instinctif qui survient lors de la dernière phase de l’accouchement, quand le col est complètement ouvert et le bébé engagé. Le corps se met à pousser “tout seul”. De la même manière que certaines envies sont irrépressibles (envie d’uriner, de vomir ou encore d’éternuer), cette poussée réflexe est involontaire. “Ça pousse” décrivent les femmes qui le vivent. 

Ce phénomène illustre la capacité innée du corps à enfanter. En se laissant guider par cette force naturelle, sans chercher à la provoquer comme c’est souvent le cas avec le fameux “poussez madame”, le corps se met en marche de façon involontaire et naturel. Cela permet de minimiser le risque de déchirure et de préserver l’énergie de la mère, soutenue par cette force extraordinaire. 

Pour vivre cette poussée réflexe ou réflexe de Ferguson, il est important de respecter le timing naturel et de ne pas pousser avant que le bébé ne soit descendu dans le canal de naissance. Sans cela, la poussée se fait dans le vide. Elle devient longue et épuisante ce qui peut inhiber le réflexe naturel. Il est logique de reconnaître que ce ne sont pas les abdominaux qui sont capables de faire naître un bébé mais bien l’utérus. 

La durée nécessaire pour les efforts expulsifs varie d’une personne à l’autre, souvent plus longue pour un premier accouchement, avec une durée moyenne de trente minutes.

“Lors de mon premier accouchement, j’ai senti mon corps pousser tout seul. Je ne pouvais rien contrôler. J’ai attendu pour voir si après la prochaine contraction ça recommençait et ça a recommencé. J’ai dit à mon mari d’aller vite chercher quelqu’un car je ne contrôlais rien !” Éva

Poussée réflexe VS poussée dirigée 

La poussée réflexe doit être distinguée de la poussée dirigée pour plusieurs raisons. La poussée réflexe est un processus instinctif et involontaire, semblable à un éternuement, où le corps de la femme pousse naturellement et efficacement, sans intervention du mental. Cette méthode préserve non seulement l’énergie de la mère, mais minimise aussi le risque d’épuisement physique et moral. 

La poussée dirigée, elle, est souvent initiée sur les conseils d’une sage-femme ou d’un gynécologue. On demande à la future maman d’utiliser ses muscles abdominaux de manière consciente et intense, afin de bloquer  sa respiration et créer une tension musculaire (“poussez, bloquez”).

Quand ça a commencé à pousser, j’étais encore à 9 de dilatation selon la sage-femme. Elle m’a ordonné d’arrêter de pousser sous peine de déchirer le col. C’était impossible d’arrêter tant ça me soulageait !” Livia

En poussant de manière volontaire, on crispe ses muscles. Imaginez-vous en train de pousser une voiture en panne, tout votre corps se tend et se fige sous l’effort. Pourtant, pour que le bébé puisse sortir, cela nécessite que le périnée s’ouvre et se détende. Ainsi, la poussée dirigée vient interférer avec le processus naturel de la naissance et peut créer des dommages importants (déchirure, épisiotomie, extraction instrumentale, etc) . 

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) classe la poussée dirigée comme une pratique fréquemment mal employée, soulignant qu’elle augmente le risque d’intervention instrumentale. L’OMS recommande de différer la poussée le plus longtemps possible, jusqu’à trois heures après une dilatation complète, pour favoriser l’émergence d’une poussée naturelle (source : Recommandations de l’OMS Sur les soins intrapartum pour une expérience positive de l’accouchement, 2018).

Qu’est-ce qui favorise la poussée spontanée ? 

La première chose qui favorise la poussée spontanée est le temps ! Laisser au corps le temps que ce réflexe se mette en marche, de lui-même, sans chercher à le précipiter. 

La deuxième chose qui peut favoriser sa venue est d’adopter une position qui facilite l’engagement du bébé dans le bassin (accroupie, debout ou à quatre pattes par exemple). 

Contrairement à l’idée reçue que le bébé doit être poussé dès que le col atteint une dilatation complète (10 centimètres), la poussée dirigée et précipitée n’est pas recommandée. Lorsque le réflexe de poussée spontanée n’arrive pas tout de suite, c’est que le bébé n’est pas encore totalement descendu, à la porte du périnée de sa maman. Si on attend que le besoin de pousser s’impose naturellement, l’effort est moindre, la poussée plus rapide et elle laisse moins de traumatismes au niveau des tissus.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) admet que la phase entre la dilatation complète et l’expulsion peut s’étendre d’une à trois heures sans nécessiter d’intervention médicale, à condition que la situation reste sans danger. 

Finalement, le processus de la poussée spontanée est si puissant et instinctif qu’il ne requiert aucun contrôle conscient. Essayer de la contrôler, voire de la provoquer est le meilleur moyen de perturber ce processus physiologique. On a tendance à penser que lorsque que le col est ouvert à 10 centimètres, le bébé est prêt à sortir et qu’il faut pousser. C’est cette erreur qui conduit souvent à initier trop tôt la poussée et de ne pas bénéficier du réflexe expulsif du bébé. 

Lorsque l’accouchement se déroule bien, la mère et l’enfant forment une équipe travaillant en harmonie. La meilleure approche est de ne pas intervenir et de permettre à cette synergie de se déployer naturellement. Il arrive que l’intensité de la poussée réflexe surprenne la mère. Dans ce cas, se concentrer sur une respiration profonde et calme peut aider à relaxer le col et le périnée et mieux gérer la douleur.

« J’ai accouché à quatre pattes mais je n’ai jamais eu envie de pousser. Je l’ai juste accompagné lorsque j’ai senti sa tête sortir. Je faisais de lentes inspirations et expirations mais je n’ai jamais eu le sentiment de pousser.  » Camille

Qu’est-ce qui peut entraver la poussée réflexe ? 

Selon le Dr Michel Odent  « le déclenchement du réflexe d’éjection du fœtus est inhibé par tout ce qui réduit le degré d’intimité » (Le reflexe d’éjection du fœtus. Les Dossiers de l’Obstétrique, juin 2001, n°295, p36).

En règle générale, les interventions médicales, telles que la péridurale, le déclenchement artificiel et l’usage d’ocytocine synthétique, semblent diminuer la force de ce réflexe naturel. Cependant, Dr Bernadette de Gasquet apporte une perspective différente, suggérant que le réflexe d’expulsion reste possible sous péridurale ou même dans un état de coma, pourvu que le temps soit laissé au processus naturel de se dérouler.

Il existe néanmoins des circonstances où l’attente du réflexe d’éjection fœtal n’est pas conseillée, notamment en cas de signes de détresse fœtale ou de liquide amniotique teinté. Dans ces situations, les poussées dirigées par le personnel médical peuvent devenir essentielles pour accélérer l’accouchement et garantir le bien-être du bébé (sans que cela termine en césarienne).

Et vous, avez-vous vécu le phénomène de la poussée réflexe ? N’hésitez pas à nous partager votre expérience ou vos questions. Nous avons hâte de vous lire !

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