Déchirure ou épisiotomie : quelles différences ?

Par Armelle Fruchard | Mise à jour le 2 juillet 2023

La perspective de la déchirure fait frémir toutes les futures mamans. Pourtant, il est essentiel de rappeler que lors d’une déchirure, on ressent seulement un étirement. Si cette déchirure peut être naturelle et spontanée, elle est parfois volontaire (épisiotomie). Que sait-on aujourd’hui des épisiotomies et des déchirures ? L’une de ces pratiques est-elle meilleure ? Que dit l’OMS à propos de l’épisiotomie ? Nos réponses. 

Quelles différences y a-t-il entre une déchirure et une épisiotomie ?

L’épisiotomie est un acte chirurgical qui consiste à inciser le périnée (plus précisément le muscle élévateur de l’anus) au moment du passage de la tête du bébé. Cette pratique permet d’élargir la sortie vaginale afin de faciliter la naissance du bébé. L’épisiotomie se pratique à l’aide de ciseaux. C’est une coupure nette de toute l’épaisseur du tissu : vagin, muscle du périnée et peau.

La déchirure est une rupture naturelle et spontanée des tissus périnéaux. Elle se produit lorsque le vagin atteint sa distension maximale. Environ 60 % des femmes auront une légère déchirure vaginale lors de leur accouchement.

À ce sujet, toutes les femmes sont différentes et il n’y a pas de règles : certaines vont subir une déchirure avec un bébé de 2,5kgs, d’autres accoucheront d’un bébé dit macrosome avec un périnée intact. Chaque corps est différent et plusieurs facteurs peuvent influencer le risque de déchirure (élasticité des tissus, position d’accouchement, circonférence de la tête du bébé, etc).

Recommandations officielles concernant la pratique de l’épisiotomie

L’épisiotomie, longtemps considérée comme la pratique à privilégier, est désormais majoritairement décriée. Alors qu’elle était pratiquée dans 95 % des naissances de premier bébé dans les années 1970 (Canada), elle est aujourd’hui en forte baisse. 

En Europe, le taux d’épisiotomie était de 20 % des naissances en 2016, on estime qu’il tourne aujourd’hui autour de 8 %. 

Selon la dernière étude du Collège nationale des gynécologues et obstétriciens français sur la prévention et la protection périnéale obstétrique (2018), voici les recommandations : 

  • importance de recevoir le consentement de la femme avant toute épisiotomie
  • l’épisiotomie n’est pas recommandé pour réduire le risque de LOSA (lésions obstétricales du sphincter anal)
  • la pratique d’épisiotomie pour réduire le risque de LOSA lors d’un accouchement gémellaire ou d’un bébé en siège n’est pas recommandée 
  • lors d’un accouchement nécessitant l’intervention d’instruments, l’épisiotomie peut prévenir les risques de déchirures anales 

Enfin, dans le dernier rapport de l’OMS sur l’épisiotomie, on trouve : “l’épisiotomie de routine ou son large emploi ne sont pas recommandés pour les femmes qui accouchent spontanément”. L’Organisation Mondiale de la Santé recommande qu’elle ne soit pas pratiquée dans plus de 10 % des accouchements. 

Pourquoi faut-il privilégier la déchirure à l’épisiotomie ?

Aujourd’hui, les grands bénéfices espérés de l’épisiotomie sont invalidés par les études médicales. 

Dans de nombreux cas, la pratique de l’épisiotomie est dite prophylactique, c’est-à-dire qu’elle a pour but de prévenir une plus grande déchirure. C’est d’ailleurs pour cette principale raison qu’il n’est pas recommandé d’inciser par “précaution”. 

On note chez les femmes ayant subi une épisiotomie plus d’incontinences fécales dans les 3 mois après l’accouchement ainsi qu’une plus grande faiblesse du périnée.

On a longtemps pensé qu’il était plus facile de cicatriser une épisiotomie plutôt qu’une déchirure, les études récentes montrent que non seulement l’un n’empêche pas l’autre (une épisiotomie peut se poursuivre en déchirure) mais également que la cicatrisation d’une déchirure est plus rapide que celle d’une épisiotomie.

Pour récapituler, voici les raisons pour lesquelles on privilégie aujourd’hui les déchirures naturelles : 

  • la déchirure respecte les fibres des tissus ce qui facilite sa guérison (zone fortement vascularisée) ;
  • le risque de perte de sang est moins important lors d’une déchirure ;
  • l’épisiotomie n’empêche pas la déchirure et semble même parfois la faciliter ;
  • les douleurs post-accouchement sont plus intenses en cas d’épisiotomie ;
  • l’épisiotomie peut être très mal vécue par la maman, telle une mutilation.

Peut-on refuser l’épisiotomie en faveur de la déchirure ? 

Personne n’écrit “épisiotomie” dans son projet de naissance. Aucun obstétricien n’a envie d’en faire, et aucune maman d’en subir. Cependant, c’est une question que vous pouvez bien sûr évoquer avec votre obstétricien. Cela peut permettre de vous rassurer et de connaître son avis sur cette intervention. D’ailleurs, cela peut aussi être l’occasion de lui demander le type d’incision pratiquée car il en existe 3 sorties (médiane, latérale, médio-latérale).

Dans le cas où cela serait nécessaire (pour accélérer la naissance en cas de détresse du bébé par exemple), vous pouvez lui demander de vous prévenir. C’est votre droit (loi Kouchner) de recueillir le consentement du patient avant toute intervention médicale.

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